Au secours : j’ai des phobies !
Je suis suivie par un psychiatre (il me suit sur Facebook). Maintenant, je suis suivie (toujours sur Facebook) par un enquêteur de la police judiciaire. Je serai bientôt suivie par un juge d’application des peines pour s’assurer que je suis bien rééduquée. Faute de quoi, on m’enverra au bagne : au choix Cayenne ou Biribi.
Car mes phobies sont graves et portent atteinte à l’unité nationale. Je suis un.e fauteur.euse de troubles et je fomente la désunion du pays en semant des écrits ou des confessions littéraires sur mes phobies. Mon psychiatre ne peut plus les contenir, je tombe maintenant sous le coup de la loi. C’est qu’on a pénalisé les peurs, certaines bien innocentes : je vivais très bien avec ma répulsion des rats, des serpents, des araignées et des imbéciles, et quelques comprimés d’anxiolytiques.
Avec les phobies pénalisées, les peurs nous sont donc interdites ! Dommage, car la peur a un grand mérite : elle met en alerte par rapport à un danger putatif et elle fixe l’anxiété, qui, elle, est diffuse. (il paraît que le cannabis est souverain).
Voilà donc au tribunal, en rangs serrés de douaniers de la psyché au regard sévère, les névroses interdites : je ne dois plus avoir peur du noir, ni du Noir, ni du Jaune. Je ne dois plus avoir peur d’un fanatique qui entre dans l’église où est célébrée une messe. Je ne dois plus dire que mon modèle, c’est un top modèle occidental longiligne élégant et non une Vénus Hottentote revisitée à la tignasse envahissante.
Mon psychiatre a diagnostiqué une phobophobie. Résultat : en plus de mon psychiatre, d’un enquêteur et de l’inspecteur des impôts, j’ai plein de gens qui me suivent sur Facebook !