La sculpture dans les églises parisiennes : l’art sacré pour enseigner, commémorer, émouvoir.

Le COARC a pour mission d’inventorier, de restaurer et de valoriser le patrimoine constitué par les 40 000 œuvres d’art sont conservées donc 96 lieux de culte, la plupart catholiques, appartenant à la ville de Paris. Voici un florilège de cette impressionnante collection.

Église saint Sulpice (Paris VIe) Vierge de douleur d’Edme Bouchardon, Mausolée de l’abbé Languet de Gergy de Michel-Ange Stoltdz.

L’église Saint-Sulpice possède des sculptures classiques de Bouchardon, des bénitiers rocaille de Pigalle, des bas-reliefs des frères Slotdz, et de nombreuses statues de Louis Boizot. C’est un musée de sculptures où se lit l’évolution de la statuaire du 18e siècle. À cette époque l’église est assez vaste pour accueillir une multitude d’œuvres d’art. La petite église devenue trop exigüe pour la population grandissante de la paroisse fut démolie en 1643 et c’est son entreprenant curé Jean Baptiste Languet de Gergy qui organisa en 1719 des loteries pour financer le projet d’un édifice capable de rivaliser par ses dimensions avec Notre-Dame de Paris. La façade est élevée à partir de 1732 par Jean-Nicolas Servandoni, qui superpose 2 colonnades sur le modèle de Saint-Paul de Londres et des grandes basiliques de Rome. Le jeune sculpteur Edme Bouchardon est chargé de réaliser 24 statues pour orner le cœur et la nef, donc seuls 10 seront finalement réalisés et placer sur des piliers du chœur : La Vierge, Le Christ et 8 apôtres. Le mausolée de l’abbé Languet de Gergy décédé en 1747 fut réalisé en 1750 par René-Michel Stoltdz, appelé Michel-Ange Stoltdz au retour de son long séjour à Rome, en raison de son talent. Il créa un tombeau caractéristique de l’art baroque romain qui demeure l’unique témoignage parisien de l’art funéraire du XVIIIe siècle

Saint Gabriel (Paris 20e)

La première pierre de cette église a été posée par le cardinal Verdier le 15 septembre 1934 le territoire de la paroisse correspond au quartier appelé autrefois le « petit Charonne ». On y trouvait les anciennes fortifications, le dépôt des tramways de la compagnie des omnibus de Paris et une usine à gaz. Bénie en 1935, elle ne fut érigée en paroisse indépendante qu’en 1938. La dédicace fut reportée après la date d’édification d’un clocher, qui resta à l’état de projet. L’orgue construit en 1980 par les Frères Steimetz a été restauré et amélioré par la firme allemande Klais en 2006.L’orgue précédent, un Cavaillé-Coll tardif « de salon » qui aurait appartenu à Marcel Dupré, occupe toujours le fond de l’église. Les frères Mauméjean ont réalisé une verrière de 26 m2 en façade . La chapelle Sainte-Cécile désaffectée en 1936, a été démolie en 1966. Il subsiste de cette époque un haut-relief en grès de Charles Desvergnes qui représente Sainte-Cécile dirigeant un chœur d’enfants, dédié à « Saint Pie X, rénovateur de la musique sacrée, au peuple du Petit Charonne ».

Église Sainte Marguerite (Paris XIe) Tombeau de Catherine Duchemin par François Girardon (1628-1715)

Ce remarquable monument funéraire a été exécuté entre 1703 et 1707 pour accueillir la dépouille de Catherine Duchemin, épouse du sculpteur de Louis XIV François Girardon, décédée le 21 septembre 1698. Elle était une peintre de fleurs réputée ainsi que la première femme à avoir été admise à l’académie de peinture et de sculpture en avril 1863. François Girardon lui-même assura le dessin de ce mausolée dont la partie principale figure le Christ descendu de la croix selon un marché signé le 12 juin 1703. Le sculpteur en confia l’élaboration à deux de ses élèves Eustache Nourrisson et Robert Le Lorrain : le premier se vit attribuer la réalisation du Christ et du drapé enroulant la croix, le second celle de la Vierge et de l’ange assis au pied de la croix. Girardon conçut le tombeau en marbre vert au pied duquel le corps de Catherine Duchemin fut déposé, en septembre 1715. Exposé initialement dans l’église Saint Landry disparue à la Révolution, la sépulture fut remontée seulement en 1818, mais privée de son sarcophage, dans le cœur de l’église sainte-Marguerite.

Église Saint Germain l’Auxerrois (Paris 1er) Anonyme, vers 1490

Très rare témoignage de la sculpture parisienne de la fin du XVe siècle en pierre calcaire polychromée, la statue de Marie l’égyptienne serait aussi la seule des statues originales qui ornaient le porche de l’église Saint-Germain l’Auxerrois à avoir été conservée. Elle a été déplacée dans la chapelle de la Vierge à l’intérieur de l’église et remplacée par une copie qui accueille désormais les fidèles et les visiteurs dans une niche sur son pilier. Cette mesure a permis de conserver sa polychromie (visiblement remaniée) qui vient rappeler que le porche de saint-Germain-l’Auxerrois était autrefois peint – on peut toujours en déceler de fines traces à l’intérieur du porche. Marie l’égyptienne, courtisane d’Alexandrie menant une vie de débauche, souvent confondue avec Marie-Madeleine, fut touchée par la grâce et se retira dans le désert. Elle est représentée avec les trois pains grâce auxquels elle vécut soixante ans durant, vêtue de ses seuls longs cheveux dorés.

Église Sainte Croix des Arméniens (Paris 3e) : Saint François d’Assise en extase,

Germain Pilon (1540-1590)

C’est à la fin du du XVIe siècle que Germain Pilon réalisa la statue de Saint François d’Assise en extase : le marbre gris évoque la teinte de la robe de bure du moine nouée à la taille par une corde restituée en plomb ,tandis que le marbre blanc est utilisé pour le douloureux visage ainsi que pour les mains et les pieds marqués par les stigmates cette statue de Germain pilon a probablement été commandée avec la Vierge de douleur conservée en l’église saint-Paul-saint-Louis ( IVe) et la Résurrection exposée au musée du Louvre pour orner la rotonde des Valois. La construction de cette chapelle funéraire adossée à la basilique Saint-Denis et voulue par la reine Catherine de Médicis en mémoire du roi Henri II ne fut jamais terminée et elle fut finalement détruite en 1719. L’œuvre est donc demeurée inachevée dans l’atelier du sculpteur. À sa mort en 1590, elle fut entreposée au Louvre jusqu’à la Révolution avant d’être donnée à la ville de Paris en 1818. Déposée à l’église des Capucins du Marais connue sous le vocable de Saint-Jean Saint -François, elle a été concédée en 1971 à l’église catholique arménienne devenue la cathédrale Sainte-Croix des Arméniens de Paris.

Église de La Madeleine (PARIS VIIIe) : le Ravissement de sainte Marie-Madeleine, Charles Marochetti (1805-1867)

Entreprise en 1834, cette sculpture achevée en 1843, un an après la consécration de l’église, hisse Marochetti au rang des sculpteurs les plus en vue de Paris. Marie-Madeleine, vêtue de sa robe de bure, est enlevée au ciel sur sa paillasse de pénitente par trois Anges. Le rythme tournoyant des Anges et le mouvement ascensionnel de la sainte s’entremêlent avec grâce dans une composition d’une rare virtuosité. L’ange majestueux, sujet de prédilection de Marochetti, arbore d’immenses ailes enveloppantes. La blancheur du maître-autel est relevée par la dorure présente sur le bas-relief devant l’autel. L’épisode du repas chez Simon est évoqué dans une longue frise à l’antique.

Article publié dans la revue Una Voce n°347 de Mai – Juin 2024