Le jeune titulaire de l’orgue de Rocamadour, Emmeran Rolin, a mis son talent et son énergie au service de la musique sacrée et d’une liturgie solennelle et habitée au cœur de ce sanctuaire, mais aussi lieu touristique, qui voit affluer plus d’un million et demi de visiteurs par an.
Quelle a été votre formation ?
Natif de Cahors, j’ai suivi après un Bac scientifique des études musicales de piano et orgue à Montauban auprès de Marc Chiron, dont je suis devenu en 2002 le remplaçant puis le co-titulaire sur l’orgue de la cathédrale.
Donc, une entrée très jeune en scène ?
Oui, j’avais quinze ans. J’ai joué pendant dix ans cet orgue baroque en noyer de 1675 de HEW, aménagé et restauré par Cavaillé en 1776, puis en 2000 par l’atelier Quoirin.
Parallèlement, -vous poursuivez des études musicales approfondies.
J’ai obtenu mon diplôme du Conservatoire de Saint Maur des Fossés dans la classe d’Eric Lebrun. Je préparais à la même époque la licence de musicologie à l’Université Jean Jaurès de Toulouse et un « Master 2 » en « Gestion des entreprises culturelles », que j’ai terminé à la Sorbonne en 2010. J’ai suivi de 2010 à 2013 l’enseignement du Pôle supérieur de musique de Toulouse pour me perfectionner en piano et en orgue ,et obtenu le Diplôme national supérieur professionnel de musicien en 2013.
Qui ont été vos maîtres ?
Michel Chapuis, Thierry Escaich, et bien sûr « ceux de Notre Dame », Philippe Lefevre, Olivier Latry, Yves Castagnet et Johann Vexo.
Et vous êtes entré dans la vie professionnelle…
J’étais toujours co-titulaire à Montauban et j’ai commencé à travailler dans l’élaboration de projets artistiques et culturels : d’abord auprès de Joël Suhubiette et de son ensemble « Les Eléments », puis à la « Fabrique « de Toulouse, une salle de concert de l’Université. J’ai surtout organisé un festival de musique à Montauban, autour de l’orgue, qui a connu trois saisons.
Et puis vient le changement de cap, Rocamadour…
J’ai démissionné de ma charge d’organiste à Montauban en 2012 et j’envisageais de m’installer en Angleterre pour y explorer de nouveaux projets musicaux. C’est à ce moment qu’un jeune compositeur encore étudiant en Master ,Christopher Gibert, m’a proposé de travailler avec lui à Rocamadour. En 2013, l’orgue de Rocamadour a été inauguré d’être construit et le recteur de l’époque, en charge du sanctuaire, souhaitait développer la présence de la musique sacrée à Rocamadour, autour de cet instrument : à la fois dans la liturgie mais également en favorisant l’organisation de concerts.
J’ai alors abandonné mon projet d’expatriation en Angleterre pour me consacrer exclusivement à l’organisation de la neuvième édition du festival de musique sacrée de Rocamadour, qui s’est tenue en 2014.
Cinq ans plus tard, le festival a pris de l’ampleur
En effet. nous proposons depuis six ans trois semaines d’activité musicale intense sur le site du sanctuaire entre le 5 et le 26 août : musique instrumentale, et académie musicale de chant sacré, d’une durée d’une semaine, ouverte à tous. L’académie propose un programme de polyphonie et de chant grégorien ,avec des ateliers dédiés à ces deux catégories. Les stagiaires chantent la liturgie grégorienne « abrégée » (Kyriale uniquement) à la messe quotidienne du matin, et chantent également les Vêpres à la crypte à 17 h. Deux heures sont consacrées chaque jour à la technique et aux fondamentaux du chant grégorien selon la méthode de Solesmes. L’académie se produit en concert le dimanche de fin de stage1.
Qu’avez-vous programmé pour l’année 2019 ?
Que se passe t’il à Rocamadour le reste de l’année ?
Nous avons constitué un chœur, « La Sportelle2 » pour pouvoir proposer des concerts de musique sacrée partout en France et des formations de musique vocale. Les choristes qui se sont engagés pour chanter dans ce chœur viennent de toute la France pour se former à raison de deux week-ends par mois. Le chœur se produira pour la première fois au festival cette année avec un programme de Saint Saëns pour voix, violon ,harpe et orgue. Ce chœur travaille la musique polyphonique et le chant grégorien.
Un projet d’enregistrement ?
Oui, le projet concerne Bach, mais aussi les musiciens liés à Rocamadour. Nous voulons raconter l’histoire musicale de Rocamadour et nous essayons d’y intéresser des partenaires et mécènes pour cette première édition.
D’une façon générale, notre mission se développera autour de la promotion de l’art sacré, dans l’esprit de Sacrosanctum concilium et de l’allocution du pape François du 14 février 2019, et de la musique en particulier, en ce qu’elle sert le culte pour les croyants, et se veut aussi une culture pour tous les autres.
Article publié dans la revue Una Voce n°324 de Novembre – Décembre 2019
- Inscriptions, programme du festival sur le site www.rocamadourfestival.com↥
- La « sportelle » est l’insigne, à l’origine en plomb moulé, que les pèlerins de Rocamadour cousaient sur leur vêtement, à titre de « laissez passer » spirituel. Il représente le sceau du monastère avec la Vierge à l’Enfant trônant dans une mandorle, un sceptre fleurdelisé dans la main droite et l’Enfant Jésus sur le genou gauche. Cette représentation est différente de la statue de la Vierge noire de Rocamadour présente dans la chapelle de la basilique Saint Sauveur.↥